Fiscalité et comptabilitéaoût 06, 2019

Responsabilité du conjoint ou d’une personne liée à l’auteur en cas de transfert de biens – Application des articles 160 et 227.1 LIR (deuxième partie)

Dans la première partie de cet article[1], nous avons discuté de la situation qui concernait l’application de l’article 160 LIR lors de la faillite d’un débiteur fiscal principal ou encore lorsqu’il s’agissait d’une proposition concordataire faite par ce dernier et homologuée en vertu de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité[2] («LFI»). Dans cette seconde partie, nous traitons de la deuxième situation qui avait été exposée, soit celle relative à l’application conjointe des articles 227.1 et 160 de la Loi de l’impôt sur le revenu(«LIR»)[3]. L’article 227.1 LIR concerne la responsabilité d’un administrateur pour des déductions à la source («DAS») non remises au fisc par une société. 

Rappel et contexte

L’article 160 LIR (reproduit à l'annexe 1 ci-dessous) est une disposition anti-évitement qui permet aux autorités fiscales canadiennes de cotiser un contribuable pour une dette fiscale d’un autre contribuable avec lequel il est lié, dans certaines circonstances. 

De façon générale, lorsqu’un contribuable a transféré des biens à l’une des personnes suivantes, sans contrepartie ou sans contrepartie suffisante, alors qu’il était endetté auprès des autorités fiscales, le bénéficiaire peut être tenu responsable de la dette fiscale de l’auteur du transfert, mais jusqu’à concurrence de la JVM des biens transférés qui excède la JVM de la contrepartie versée pour le bien ainsi obtenu. 

Les personnes visées au paragraphe 160(1) LIR, conséquemment par une cotisation éventuelle, sont:

  1. l’époux ou conjoint de fait de l’auteur du transfert, ou une personne devenue depuis son époux ou conjoint de fait; 
  2. une personne qui était âgée de moins de 18 ans; 
  3. une personne avec laquelle l’auteur avait un lien de dépendance.

Pour que le paragraphe 160(1) LIR s’applique, quatre conditions doivent être remplies:

  1. l’auteur du transfert doit être tenu de payer des impôts en vertu de la Loi au moment de ce transfert; 
  2. il doit y avoir eu transfert direct ou indirect de biens au moyen d’une fiducie ou de toute autre façon; 
  3. le bénéficiaire du transfert doit être une personne qui a un lien de dépendance avec l’auteur du transfert, être une personne de moins de 18 ans au moment du transfert ou être une personne qui est depuis devenue l’époux ou le conjoint de fait de l’auteur du transfert; 
  4. la juste valeur marchande des biens transférés doit excéder la juste valeur marchande de la contrepartie donnée par le bénéficiaire du transfert. 

Tel que mentionné précédemment, l’article 160 LIR s’applique aux transferts ainsi effectués depuis le 1er mai 1951. Cette disposition n’est pas de droit nouveau, mais récemment la Cour canadienne de l’impôt («CCI») et la Cour d’appel fédérale («CAF») ont été appelées à se prononcer sur deux cas différents où d’une part, un contribuable avait fait une proposition concordataire à laquelle l’ARC avait consenti à libérer un débiteur fiscal[4] et d’autre part, à se prononcer si l’article 160 LIR s’appliquait à une dette fiscale d’un administrateur d’une société encourue pour des déductions à la source non remises, en vertu de l’article 227.1 LIR.[5]

Dans la première partie de cet article (parue en juin 2019), nous avons abordé la première situation, soit celle qui concerne la faillite d’un débiteur fiscal principal ou encore lorsqu’il s’agit d’une proposition concordataire faite par ce dernier et homologuée en vertu de la LFI[6]. Passons maintenant à la seconde situation, celle relative à l’application conjointe de l’article 227.1 et de 160 LIR.

Cas du débiteur fiscal poursuivi par l’ARC sous de l’art. 160 LIR pour une dette d’un tiers

La situation qui suit est le cas d’un débiteur fiscal qui est poursuivi par le fisc en vertu de l’article 160 LIR pour une dette d’un tiers (époux, conjoint de fait ou personne liée) découlant d’une responsabilité statutaire prévue à l’article 227.1 LIR (responsabilité d’un administrateur pour défaut d’effectuer des retenues).

Responsabilité des administrateurs

L’article 227.1 LIR (reproduit à l’annexe 2 ci-dessous) établit une responsabilité personnelle et solidaire pour les administrateurs d’une société à l’égard de certaines sommes qui doivent être déduites de certains paiements (ristournes, déductions salariales et autres versements, impôt de la Partie XIII) et remises au Receveur général du Canada. La situation sous étude concerne plus particulièrement les déductions salariales qu’une société payeuse doit remettre au gouvernement en vertu de l’alinéa 153(1)a) LIR.

Restrictions relatives à la responsabilité

Le paragraphe 227.1(2) LIR énonce qu’un administrateur n’encourt la responsabilité prévue au paragraphe (1) que dans l’un ou l’autre des cas suivants:

  1. un certificat précisant la somme pour laquelle la société est responsable selon ce paragraphe a été enregistré à la Cour fédérale («CF») en application de l’article 223 et il y a eu défaut d’exécution totale ou partielle à l’égard de cette somme;

Me Jacques Ostiguy, avocat, F.Adm.A., Pl.Fin., CMC, de l’étude Avocats-Conseils Ostiguy Laurin, s.n. L’auteur est également chargé de cours à l’UQAM, à l’École de gestion de l’Université de Sherbrooke et professeur au Collège de Valleyfield.

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